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25 mai 2019

Les incontournables de Lao Ya Dureuz (35)

Un lama peut-il en cracher un autre?

La rengaine, elle sortait de nulle part. T’avais beau essayé de regarder ailleurs, de modifier la longueur de tes pas, ça fredonnait toujours la petite musique intérieure. T’avais l’impression que tu pourrais la chanter.  Pourtant fallait pas croire ça. Lao Ya Dureuz connaissait bien cette petite ritournelle, ce petit air freluquet qui cadençait ses enjambées. Lent méditateur à sornettes pour esprits en goguette, Lao mettait un pied devant l’autre et recommençait le même geste à raison de décimètres sans fin, ou presque, sur les chemins herbeux de sa contrée hospitalière. C’était rafraîchissant sur le mollet.

De nombreux poncifs d'une littérature jadis vaillante indiquait que l'inspiration venait en marchant.  Bon, c'était touchant  des deux bouts, mais y'avait des chances que l'expiration soit moins coulante dans le déhanchement du déambulateur, ça toussait dans les jointures. Certain gardait le contact à base de fluides pathogènes d’industries pétrolières, mais c'était moins gouleyant. Donc le grand Sachant pratiquait la séance de grande mouvance pédestre dans la régularité de sa méditation. 

Son fidèle compagnon était aux côtés de son immensité, beau marcheur lui aussi, solide dans la masse, silencieux dans le chaloupé, sépulture à conscience bien que soupe-au-lait dans la démesure. Lao goûtait le plaisir modeste d’une procession lente et raisonnée. Ce fidèle compagnon, outrecuidant camélidé, vaquait à ses occupations, broutant çà et là quelques herbettes à portée de ses canines, exprimant par un éventail sonore sa névrose passagère. Point de lamentation tendancieuse sur le profil durable de la bête laineuse, mais fallait le reconnaître : le lama a mal. Cet état était à la portée d’oreilles d’un Lao en supervision.

Le Grand Sachant entendait la complainte du Lama :

C'est mon ami et c'est mon maître 
C'est mon maître et c'est mon ami 
Dès que je l'ai vu apparaître 
J'ai tout d'suit' su que c'était lui 
Lui qui allait m'apprendre à être 
Ce que modestement je suis 
Comme une chèvre vendéenne 
Mon ami, mon maître (S. L.)

A l’intersection suivante, l’amas de laine était vapeur… Lui digne héritier d’une lignée chamalesque de troisième génération crochetait mal à cette déambulation verbale vers la souche des caprins. Le camélidé bien proportionné au duvet simili-alpaga hoquetait des deux oreilles pour bien signifier sa déshumeur ambiante, ça frôlait l’incident communautaire, le brouillard des Andes en version machine à fumigène. C’est bien pour l’ambiance mais très vite t’as le fumet d’une vaporette. Il avait le regard noir des mauvais jours, l’haleine des temps modernes et la déjection en mode baveux sur la lèvre supérieur. C’est sûr, y’avait une production gastrique à viscosité en partance dans le gosier et ça allait bientôt sentir la nébuleuse salivaire. Fallait rester digne devant le condiment laineux. Lao Ya Dureuz, au sang-froid telle la piémontaise un soir de carême, comprit qu’il valait mieux rebrousser dans l’artère car un lama peut toujours en cracher un autre et là ça dégomme les fondations du savoir-vivre. La technique du croisillon dans le jet était vieille comme les incisives du caniche nain de ma voisine, un repère à gégènes. Donc, tout cela pour dire que la locomotion avait le recto du versatile et qu’il fallait bien choisir son compagnon d’embardée pour éviter les embourbements. Le propre de l’homme est de marcher et souvent de marcher sur ses congénères, et oui monsieur y’a pas que la lune qu’on a piétinée. Marcher, cracher, il en restera toujours quelque chose, … des miasmes. Ken Tuch’ les burnes.

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